Sept hauts lieux des Ecrins lancent une initiative commune. Leur intention : réenchanter leurs villages, promouvoir un alpinisme respectueux, transmettre la tradition, veiller à leur milieu naturel pour continuer à vivre en haut du haut.
Villages d’alpinisme des Écrins
Alors que l’alpinisme est désormais inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO, sept hauts lieux des Écrins lancent une initiative commune. Leur souhait : réenchanter leurs villages, promouvoir un alpinisme authentique et respectueux, transmettre la tradition aux nouvelles générations, sensibiliser le public à la beauté fragile du milieu naturel. Des montagnards « sentinelles du climat » en quête d’un juste équilibre pour préserver une nature d’exception et continuer à vivre en haut du haut.
La grande histoire
Avec plus de 150 sommets au-dessus des 3 000 m d’altitude et ses glaciers qui les coiffent, l’imposant massif des Ecrins est un mythe de l’alpinisme en France. Il faut dire que la Barre des Écrins (4 102 m) a été le point culminant du pays jusqu’en 1860, date de l’annexion de la Savoie à la France. L’histoire retiendra le nom du britannique Edward Whymper qui réalise la première ascension du sommet en 1864 tout comme ceux des fratries de guides du pays les Rodier, Siemond, Engilberge, Estienne et le fameux Pierre Gaspard de la Bérarde dit « Gaspard de la Meije ». La construction par le Club Alpin Français du premier refuge dans le cirque du glacier blanc est effectuée en 1903, l’abri Caron. Et 1973 marque la naissance du parc national. C’est ici, dans les villages d’alpinisme des Écrins, que les pionniers ont écrit l’histoire de la montagne.
Le point d’équilibre
La démarche « Bergsteigerdörfer » (villages d’alpinisme en français) est initiée en Autriche
en 2008. L’initiative a fait florès en Allemagne, Italie, Slovénie puis en Suisse. Aujourd’hui, une trentaine de villages est concernée en Europe. Les villages d’alpinisme des Écrins s’inspirent librement de ce concept. Désireux d’affirmer avec force leur positionnement « haute montagne » et leurs spécificités, ils l’adaptent et espèrent à terme entraîner derrière eux d’autres villages des Alpes françaises. Leur manifeste tient en quelques mots « réenchanter nos villages, promouvoir un alpinisme authentique et respectueux, transmettre la tradition aux nouvelles générations, sensibiliser le public à la beauté fragile du milieu naturel, trouver le juste équilibre entre préservation d’une nature d’exception notre plus grande richesse et nos activités humaines, afin de pouvoir continuer à vivre en haut du haut. »
En haut du haut !
La Grave, Villar-d’Arène, Le Monêtier-les-Bains, Vallouise-Pelvoux, La Chapelle-en-Valgaudemar, Saint-Christophe-en-Oisans et Valjouffrey.
Tout commence et tout finit ici : les courses d’alpinisme vers le Grand Pic de la Meije, l’Olan ou les Aiguilles de la Bérarde, l’itinérance du Grand Tour des Écrins par le GR54, l’escalade sur les falaises d’Ailefroide, les randonnées vers l’un des trente refuges du massif comme le fameux refuge de l’Aigle, les balades en famille à destination du Voile de la mariée au Gioberney ou du Pré de Madame Carle à Ailefroide, le spectacle des glaciers et des lacs d’altitude. Sept villages d’alpinisme dans les Écrins, autant de camps de base au sein du parc national éponyme. Des villages où bat le cœur d’hommes et de femmes de passion, les gardiens de refuges, les guides de haute montagne, les gardes, les scientifiques du parc pour qui le partage et la solidarité sont le reflet de l’identité et des traditions montagnardes. Des lieux de transmission où vit la culture de l’alpinisme depuis des générations.
Forts en caractère et faciles d’accès
Chaque village d’alpinisme est singulier, il compose avec son milieu naturel. Selon vos déplacements vous vous laisserez cueillir par la beauté simple des toits de chaume, des bardages en mélèze, des voûtes, des arcades, des caves isolées, des vieilles pierres de tuf ou de calcaire bleu taillées, des fontaines et lavoirs, des moulins, des fours. Vous apprécieriez la fraîcheur des ruelles pavées ponctuées de modestes édifices religieux. Les robustes bâtisses résistent aux affres du temps et de la pente mais elles demeurent humbles face à la puissance des éléments.
Les activités de montagne y sont légion tant les sommets, les vallées, les glaciers, l’eau vive qui court sont de beaux terrains de jeux. Contrairement aux idées à la peau dure, chacun peut les pratiquer à son niveau, quel que soit son âge. Là-haut, l’émotion du dépassement de soi est universelle, celle de la contemplation aussi. Les visites culturelles, les lieux d’éveil que sont les maisons du parc, la vie de village qui facilite les rencontres avec les figures locales, les artisans ou les producteurs ne manquent pas.
Sensibles de nature
Plantés en haute montagne les villages d’alpinisme sont en première ligne du réchauffement climatique : recul des glaciers, éboulements rocheux, érosions, crues torrentielles, changements de végétation. Ils sont surtout à portée de marche d’une incroyable biodiversité. Plus de 4 500 espèces animales et végétales y sont recensées. Certaines sont emblématiques, comme le bouquetin réintroduit en 1977, le chamois, le lagopède alpin, le gypaète barbu, quelques insectes discrets et menacés comme le criquet des torrents, bien sûr des conifères, la reine des Alpes ou quatre espèces de génépi dont le rarissime génépi des glaciers. Une nature aussi belle que fragile. Alors, regarde en haut !